Soitec doit démonter immédiatement son parking illégal !
contre la collusion public-privé, obligeons la mairie à défendre les zones humides
Fin septembre 2025, nous révélions que l’entreprise Soitec a illégalement artificialisé 5000m² de terres agricoles en zone humide pour y construire un parking. Des riverains qui avaient signalé par courrier cette infraction à la mairie ont obtenu une réponse de celle-ci qui confirme nos révélations. Mais cette réponse montre aussi à quel point l’institution publique cherche à couvrir l’industriel et à le dédouaner de ses responsabilités.
Jetons un œil au courrier de réponse de la mairie et concentrons-nous particulièrement sur les parties soulignées :
Monsieur ,
Je reviens vers vous suite à votre signalement concernant l’aménagement d’un parking par l’entreprise SOITEC sur la commune de Bernin, cela sans autorisation de la commune.
Je tiens à vous préciser que c’est suite à votre courriel que la municipalité a découvert l’existence des interrogations autour de cet aménagement. Aucune démarche préalable n’avait donc permis à la commune d’être informée ou de se prononcer auparavant.
Aussi, dès que la commune en a eu connaissance, nous avons pris attache directement auprès de SOITEC. L’entreprise nous a alors indiqué qu’il s’agissait d’un aménagement réalisé de manière temporaire, mis en place dans le cadre d’un conventionnement avec le propriétaire du terrain, élaboré en lien avec la Chambre d’agriculture de l’Isère et la SAFER. Dans ce cadre, nous avons été informés que l’aménagement temporaire réalisé avait consisté à apposer du concassé sur une toile de protection permettant d’étanchéifier ce parking provisoire par rapport à la terre agricole située dessous, et qu’en amont la société SOITEC avait requis l’intervention d’un pédologue afin d’analyser la qualité et le fonctionnement des sols à ce niveau.
Nous avons également appris à cette occasion que la Direction départementale des territoires (DDT) avait été informée de cette opération directement par l’entreprise SOITEC. Nous restons dans l’attente d’un retour de leur part quant aux déclarations / autorisations que l’entreprise SOITEC aurait le cas échéant obtenue / du obtenir.
Au vu de ces informations recueillies, il ne semble pas que la société SOITEC ait cherché à s’exonérer d’une quelconque relation avec les pouvoirs publics, mais elle ne s’est en tout cas pas adressée à la Mairie de Bernin, ce que nous regrettons.
Nous rappelons par ailleurs qu’il ne s’agit pas d’une occupation définitive mais bien temporaire de ce terrain, jusqu’au mois de juin 2026 selon la convention conclue à cet effet, avec à terme sa remise dans son état initial selon constat opéré en amont des aménagements réalisés.
Aussi, nous ne manquerons pas de revenir une nouvelle fois vers vous lorsque la commune disposera de toutes les informations sur le sujet.
Cordialement,
Directeur Général des Services
1. Une triple infraction caractérisée
Que nous apprend cette réponse de la mairie ? Déjà, elle confirme le fait que Soitec est en infraction pour avoir artificialisé une parcelle agricole, qui plus est zone humide, alors que le règlement de la zone A du PLU de Bernin n’autorise pas la création de parkings1, y compris non-bitumés2 et provisoires. Il s’agit donc d’une infraction caractérisée au Code de l’urbanisme.
La réponse de la mairie nous apprend également qu’un revêtement en stabilisé sur du géotextile étanche a été réalisé sur la parcelle (« concassé sur une toile de protection permettant d’étanchéifier ce parking provisoire par rapport à la terre agricole située dessous ») : il s’agit d’un aménagement conséquent induisant une artificialisation des sols qui semble incompatible avec la vocation agricole et humide de la zone. Si Soitec met en avant que cette artificialisation est provisoire, le caractère supposément réversible de l’aménagement réalisé est hautement improbable : par quel miracle le sol d’origine ressusciterait-il après avoir passé plusieurs années sous des centimètres de gravats et sous le poids de voitures, de containers, d’engins et de matériel de chantier (voir photos).
Photographies prises en octobre 2025 autour de la parcelle 102. On y aperçoit : des containers, des engins de chantier, du matériel stocké.
Ainsi, la réponse de la mairie confirme qu’il s’agit d’une triple infraction de Soitec : 1) un aménagement sans permis de construire ou autorisation d’urbanisme équivalente ; 2) en infraction avec ce que permet le règlement du PLU de la ville ; 3) et qui plus est, sur une zone humide (en violation du droit de l’environnement).
2. La mairie de Bernin ne « découvre » pas la situation
Dans ce courrier, la mairie de Bernin « tien[t] à [n]ous préciser » que « c’est suite à [n]otre courriel que la municipalité a découvert l’existence des interrogations autour de cet aménagement. Aucune démarche préalable n’avait donc permis à la commune d’être informée ou de se prononcer auparavant. »
La mairie découvrirait la situation ? Très peu probable ! Rappelons deux faits :
Premièrement, la présence de Claude Talon en tant qu’adjoint au maire sur la période 2014-2020, en charge des finances et des Travaux de Bernin. Claude Talon est l’un des dirigeants de Soitec, connu entre autre pour avoir signé la demande environnementale de l’extension de 2019 ! Ce même élu a voté en faveur du PLU de Bernin, approuvé en 2016, et donc, il savait nécessairement que le parking de la parcelle 102 était une infraction. Nous avons donc un ancien élu, qui dispose de liens avec la mairie, qui connaît le PLU, qui connaît le déroulement des autorisations et qui s’occupe des projets d’extensions de Soitec. Comment la mairie aurait-elle pu passer à côté de cette artificialisation ?
Deuxièmement, ladite parcelle faisait partie du projet d’extension de la ZAE des Fontaines, puis en a été retirée car son artificialisation présentait un risque trop élevé d’atteinte à la zone humide de Bernin. Lors du conseil communautaire du 7 avril 2025 votant l’avenant de modification des plans de cette extension3, les deux élus de Bernin (la maire Anne-Françoise Besson et l’adjoint Christophe Duret) ont voté favorablement à cette modification4. Dans le document remis aux élus lors du conseil communautaire, le plan a été modifié et la parcelle 102 a été retirée du projet pour préserver une zone humide et des terres agricoles. Pourtant, au moment du vote, cette même parcelle était déjà artificialisée par Soitec ! Comment les élus de Bernin ont-ils pu ignorer cette situation qui dure depuis plus de trois ans ?
Avant :
Après :
Ainsi, Soitec (via l’un de ses dirigeants) était au courant que le PLU de Bernin était incompatible avec la construction d’un parking sur la parcelle 102, et la mairie de Bernin avait sous les yeux une artificialisation illégale durant depuis plusieurs années. Au vu des liens entre élus et industriels, il semble très improbable que la Mairie ait été ignorante du dossier.
3. Grand seigneur, la mairie de Bernin « excuse » Soitec
Pourtant, à lire la réponse de la mairie, Soitec n’aurait à aucun moment cherché à « s’exonérer d’une quelconque relation avec les pouvoirs publics » en ne déposant pas de demande d’autorisation d’urbanisme auprès de la mairie : manque de bol, l’entreprise se serait juste trompée d’interlocuteur en informant, à la place de la mairie, la Direction départementale des territoires (DDT), la chambre d’agriculture et la SAFER. Il est quand même hautement improbable qu’une entreprise de l’envergure de Soitec oublie de s’adresser à l’autorité compétente dans le cadre d’une extension. Il est bien plus probable que Soitec escomptait passer entre les mails du filet pour avancer au plus vite sur ses travaux sachant que son projet n’était pas réalisable compte-tenu du PLU en vigueur.
Aussi peut-on se demander si la DDT, à savoir l’instance chargée du contrôle de légalité des actes d’urbanisme pris par la commune, a bel et bien été informée par Soitec. Si oui, cela signifierait que la DDT ou le Préfet a couvert une infraction au droit de l’urbanisme en ne la signalant pas.
Conclusion : à Bernin, on n’embarrasse pas les industriels avec la loi
Le cas de la parcelle 102 apparaît comme une énième preuve du fait que les industries de puces sont vraiment chez elles dans le Grésivaudan et ne s’embarrassent même pas du peu de garde-fous légaux. Ainsi, la réponse de la mairie traduirait-elle un certain malaise à reconnaître cet état de fait et une tentative maladroite pour le masquer ? Serait-ce que la commune, censée porter plainte dans pareil cas, serait embarrassée et souhaiterait éviter d’en arriver là pour maintenir ses bonnes relations avec le premier industriel de son territoire ? Ou serait-ce qu’à l’approche des municipales, la maire, Anne-Françoise Besson, qui a été élue avec la promesse de campagne de réviser le PLU de manière concertée avec les Berninois-es souhaiterait mettre cette histoire sous le tapis ?
La mairie de Bernin a jusqu’ici complaisamment fermé les yeux sur l’artificialisation illégale de la parcelle 102. Il nous faut à présent nous mobiliser pour imposer la remise en état sans délai de cette parcelle et contraindre la mairie à défendre les zones humides (ce que tâche de faire ce courrier) !
Contre la collusion public-privé, les usines de puces et leurs nuisances, dégageons Soitec de la parcelle 102 !
NO PUÇARAN !
STopMicro, novembre 2025.
1Cf. page 122 https://www.bernin.fr/include/viewFile.php?idtf=7244&path=d2%2FWEB_CHEMIN_7244_1705915306.pdf
2https://urbanisme.collectivites.legibase.fr/point-de-vue-expert/peut-implanter-des-stationnements-publics-non-bitumes-en-zone-agricole-selon-le
3https://www.le-gresivaudan.fr/cms_viewFile.php?idtf=13127&path=DEL-2025-0090_Avenant1_ContratConcessionAmenagementExtension_ZAEParcFontainesBernin.pdf&dl=1
4Voir vidéo du conseil communautaire, à 1:49:00 https://www.youtube.com/watch?v=6Fjne68t5SM




